Dans un contexte où États, entreprises et bailleurs cherchent à concilier sécurité énergétique et réduction des émissions, l’hydroélectricité et le solaire photovoltaïque s’imposent comme deux piliers incontournables de la transition énergétique africaine. Leur complémentarité devient un enjeu central pour atteindre l’accès universel à l’électricité et renforcer la résilience du continent face aux chocs climatiques.
Hydroélectricité : un socle historique fragilisé par les aléas climatiques
L’hydroélectricité demeure aujourd’hui l’une des principales sources d’électricité en Afrique, avec 43,5 GW de capacité installée, soit environ 20 % de la production totale d’électricité sur le continent. Pourtant, selon le rapport World Hydropower Outlook 2025 publié par l’International Hydropower Association, cela ne représente que 10 % du potentiel technique exploitable du continent.
Le secteur connaît un regain d’intérêt, avec un pipeline de projets important : 16 GW en cours de construction et 18,5 GW en phase de préparation avancée. Si ces projets aboutissent, ils permettraient une augmentation de près de 80 % de la capacité hydroélectrique africaine. Néanmoins, de nombreux défis subsistent : risque de change, faibles garanties contractuelles et acceptabilité sociale. En 2024, quatre pays ont mené des chantiers majeurs – Tanzanie, Éthiopie, Cameroun, Ouganda – ajoutant 4507 MW à la capacité du continent.
Mais des projets emblématiques comme le Grand Inga en République démocratique du Congo illustrent les limites d’un modèle encore trop dépendant des financements publics, souvent longs et complexes à mobiliser.
Solaire photovoltaïque : une dynamique de croissance portée par le secteur privé
À côté de cette filière historique, le solaire photovoltaïque affiche une progression spectaculaire. Sa capacité installée a atteint 15,3 GW fin 2024, en hausse malgré un léger ralentissement des nouvelles installations (2402 MW en 2024 contre 3076 MW en 2023). Ce repli est principalement lié à la stabilisation du marché sud-africain, historiquement leader du continent.
Mais la tendance reste porteuse : selon le Africa Market Outlook for Solar PV 2025–2028 du Global Solar Council, 23 GW supplémentaires pourraient être déployés d’ici 2028. Cette dynamique est portée par l’émergence de nouveaux marchés, notamment en Afrique de l’Ouest et australe. Avec un potentiel solaire estimé à 7,9 TW, cette ressource apparaît comme la plus abondante et accessible du continent.
Vers une complémentarité stratégique
Si ces deux filières présentent des contraintes similaires – lenteur administrative, dépendance aux financements externes, incertitude tarifaire –, leurs logiques de déploiement divergent. L’hydroélectricité repose sur de grands projets publics, souvent longs à structurer. Le solaire, à l’inverse, attire des investissements privés grâce à des solutions plus décentralisées et modulables.
C’est précisément dans cette différence que réside leur complémentarité. Le développement d’approches hybrides, combinant solaire et hydroélectrique, ouvre la voie à des systèmes plus résilients : optimisation des barrages, projets solaires flottants, micro-réseaux intégrant mini-centrales hydro et solaire… Ces synergies deviennent d’autant plus essentielles que les ressources en eau sont menacées par le changement climatique.
Une réponse à la quête d’accès universel
Alors que plus de 600 millions d’Africains restent sans accès à l’électricité, l’articulation entre solaire et hydroélectrique pourrait constituer un levier efficace pour élargir l’accès tout en réduisant l’empreinte carbone du mix énergétique. À long terme, leur complémentarité offre une voie crédible pour bâtir une infrastructure énergétique plus inclusive, plus propre et plus résiliente.