L’Afrique, deuxième source mondiale de pollution plastique marine via les cours d’eau, reste vulnérable malgré sa faible production. La deuxième phase de la Clean Oceans Initiative veut changer la donne.
Face à l’aggravation de la pollution plastique marine, les banques publiques de développement européennes ont lancé, le 9 juin 2025 à Nice, la deuxième phase de la Clean Oceans Initiative (COI), lors de la Conférence des Nations unies sur l’océan. Objectif : mobiliser au moins 3 milliards d’euros d’ici à 2030 pour lutter contre ce fléau mondial.
Cette nouvelle étape marque un tournant stratégique : au-delà de la gestion des déchets et des eaux usées, elle inclut désormais l’innovation dans les emballages, le renforcement des capacités de recyclage et des actions en amont des chaînes de valeur. Une évolution nécessaire alors que les projections des Nations unies annoncent un triplement des volumes de plastiques déversés dans les océans d’ici 2040.
L’Afrique au cœur du paradoxe plastique
Bien que l’Afrique ne produise que 5 % du plastique mondial et en consomme 4 %, elle est paradoxalement la deuxième source de pollution plastique marine par les fleuves, selon l’OMS. Ce paradoxe s’explique par l’absence ou l’insuffisance d’infrastructures de collecte et de traitement, notamment dans les villes côtières et les zones inondables.
Sans investissements ciblés, la pollution continue de s’accumuler et de nuire aux communautés de pêcheurs, à la biodiversité marine et aux économies littorales. Dans de nombreuses régions, le plastique est brûlé ou rejeté à ciel ouvert, avec des effets dévastateurs sur la santé publique et l’environnement.
Des projets concrets au Togo et au Bénin
La première phase de la Clean Oceans Initiative, entre 2018 et 2025, a déjà mobilisé 4 milliards d’euros, avec des projets concrets en Afrique de l’Ouest :
- À Lomé (Togo), un programme de gestion intégrée des déchets solides a été soutenu pour réduire les plastiques rejetés dans les cours d’eau.
- Au Bénin, la COI a cofinancé des aménagements contre les inondations, protégeant les populations et limitant les déchets plastiques transportés vers l’Atlantique.
Une réponse multilatérale en construction
Pour élargir l’impact mondial de l’initiative, les partenaires de la COI – dont la Banque européenne d’investissement (BEI) – engagent de nouveaux bailleurs. La Banque asiatique de développement a rejoint la coalition, tandis que des discussions sont en cours avec la Banque mondiale et la Banque interaméricaine de développement, dans le but de construire une réponse coordonnée à la crise océanique.
Vers une économie bleue durable
La COI s’inscrit dans une dynamique multilatérale plus large :
- Le traité sur la haute mer, adopté en 2023, prévoit la création de zones marines protégées dès 2026.
- Un nouveau mécanisme de financement de l’économie bleue est attendu à l’horizon 2028, pour combler un déficit d’investissements estimé à 175 milliards USD/an.
Une urgence pour l’Afrique
Dans une Afrique encore peu équipée pour faire face à la pression plastique, ces initiatives sont vitales. Elles représentent un levier crucial pour protéger les océans, les populations littorales et les écosystèmes. Sans un soutien massif, le continent risque de payer le prix fort d’une pollution qu’il n’a pas causée.