Dans un contexte de transition énergétique progressive, la Côte d’Ivoire entend faire évoluer son parc automobile en intégrant davantage de véhicules électriques. L’État ambitionne en effet d’atteindre une part de 10 % de véhicules électriques d’ici cinq ans. Une orientation que les acteurs du secteur privé, à l’instar de Pétro Ivoire, s’emploient à accompagner activement.
Lors d’un entretien accordé en marge du Choiseul Africa Summit à Abidjan, le directeur général de Pétro Ivoire, Sébastien Kadio-Morokro, est revenu sur les enjeux et les ambitions de son entreprise dans le domaine de la mobilité durable. Face à la mutation du secteur énergétique, le groupe affirme miser sur une approche partenariale pour développer un réseau national de bornes de recharge.
Vers un maillage progressif du territoire
Si les premières installations ont été réalisées à Abidjan, l’objectif est de mailler progressivement l’ensemble du pays. « Nous planifions l’implantation de bornes le long des axes structurants, nord-sud et est-ouest, afin de permettre à terme des déplacements interurbains en véhicules électriques », indique le dirigeant. La stratégie de déploiement reste toutefois conditionnée à l’évolution de la demande, notamment celle émanant des opérateurs de transport urbain et des services VTC, de plus en plus engagés dans la conversion de leurs flottes.
Pétro Ivoire adopte un modèle économique ciblé, misant d’abord sur les clients institutionnels pour garantir la rentabilité des infrastructures. « Pour ces opérateurs, le coût d’utilisation d’un véhicule électrique sur 100 km est déjà inférieur à celui d’un véhicule thermique », souligne Sébastien Kadio-Morokro. L’entreprise propose ainsi des partenariats basés sur des engagements réciproques : elle installe les équipements pendant que les flottes s’électrifient selon un calendrier défini.
L’intégration des énergies renouvelables au cœur du modèle
Conscient des enjeux liés à la pression sur le réseau national d’électricité, le groupe mise sur des sources alternatives. Plusieurs stations de recharge, dont celle de Yopougon Gandhi, fonctionnent déjà grâce à l’énergie solaire. Ce modèle est appelé à se reproduire. « Nous avons noué un partenariat avec une entreprise locale pour la fabrication des batteries et des équipements d’alimentation solaire », précise-t-il, soulignant la volonté de bâtir un écosystème local complet autour de la mobilité durable.
La transition énergétique souhaitée ne vise pas à exclure les carburants fossiles à court terme. Le dirigeant estime que les renouvelables doivent coexister avec les solutions conventionnelles, dans une logique d’évolution progressive et de viabilité économique. « Les énergies renouvelables, à elles seules, ne suffiront pas à couvrir l’ensemble des besoins de l’Afrique à court terme », insiste-t-il.
Renforcement du réseau gazier et expansion régionale
Parallèlement à ses initiatives dans l’électromobilité, Pétro Ivoire poursuit ses investissements dans la filière du gaz butane, qui représente 35 % de ses activités. Une nouvelle usine d’emplissage est en cours de finalisation à Bouaké, ville stratégique pour désenclaver l’approvisionnement des zones nord du pays. Ce modèle logistique régional, décrit comme un « hub », sera dupliqué dans d’autres pôles urbains.
Le groupe intensifie également ses efforts de sensibilisation à l’usage du gaz domestique, un levier essentiel pour améliorer les conditions de vie et réduire la dépendance au bois-énergie, notamment en milieu rural.
Cap sur la croissance des services énergétiques
La stratégie industrielle de Pétro Ivoire repose sur trois piliers principaux : l’extension de ses infrastructures gazières, le renforcement de son réseau de stations-service, et le développement de services annexes tels que les mini-garages. Actuellement, l’entreprise compte dix points de service mécanique en partenariat avec Point S, dont neuf sont intégrés aux stations.
Enfin, en dépit des mutations du secteur, l’entreprise n’envisage pas pour l’instant de se diversifier vers les biocarburants. Elle privilégie une consolidation de ses segments clés, en s’adaptant aux régulations locales, notamment au niveau des prix de vente à la pompe, fixés par l’État.
Par cette approche structurée, Pétro Ivoire entend jouer un rôle actif dans la transformation énergétique du pays, en contribuant à la fois à l’émergence d’une industrie bas carbone et à la consolidation de la sécurité énergétique nationale.