...

Forêts gabonaises : un actif climatique de 75 milliards $ encore sous-exploité

Articles similaires

Le Gabon, reconnu comme l’un des rares pays à absorption nette de carbone, se distingue par un patrimoine forestier exceptionnel. Chaque année, ses forêts absorbent environ 100 millions de tonnes nettes de CO₂, soit près de trois fois les émissions nationales, selon la Banque mondiale.

Pourtant, cette contribution climatique majeure ne se traduit pas encore par des revenus significatifs pour l’État. Dans sa note de conjoncture économique publiée le 26 juin 2025, la Banque chiffre à 75,1 milliards de dollars la valeur totale des services fournis par les forêts gabonaises entre 2000 et 2020, dont 99 % liée à la séquestration de CO₂.

Une contribution mondiale sans retour financier équivalent

Malgré cette valeur, la quasi-totalité des services écosystémiques ne font l’objet d’aucune contrepartie financière directe, selon l’institution. Le paradoxe est clair : le Gabon fournit un bien public mondial, mais ne reçoit qu’une fraction de sa valeur réelle.

En 2019, le pays a signé une lettre d’intention avec la Norvège dans le cadre de l’Initiative pour la Forêt d’Afrique Centrale (CAFI), pour un montant de 150 millions $. Cela représente seulement 0,2 % de la valeur estimée par la Banque mondiale.

Les limites des mécanismes actuels

Deux facteurs expliquent ce déséquilibre :

  • L’absence d’un mécanisme international structuré pour rémunérer durablement les pays stockeurs de carbone.
  • La faible maturité des marchés du carbone et des accords bilatéraux environnementaux, souvent limités à des montants expérimentaux ou dépendants de financements volontaires.

Même les initiatives comme REDD+ restent tributaires de procédures complexes, d’engagements ponctuels, et de la fragilité des marchés volontaires du carbone, dont les prix et la crédibilité sont en chute libre depuis 2023.

Une réalité partagée par les pays tropicaux

Le cas gabonais illustre un déséquilibre global. En 2021, la RDC a signé un accord CAFI de 500 millions $, et le Fonds Amazonie au Brésil a mobilisé plus de 600 millions $ en 2023. Ces montants, bien qu’importants, restent très inférieurs aux valeurs écologiques estimées, souvent exprimées en dizaines de milliards de dollars.

Quelles perspectives pour le Gabon ?

Selon la Banque mondiale, le Gabon devrait intensifier ses efforts de monétisation via les marchés carbone réglementés, les mécanismes de paiements pour services environnementaux (PSE) ou encore des accords bilatéraux innovants.

Mais ces solutions exigent des capacités techniques solides, des certifications rigoureuses et une gouvernance climatique crédible. La réussite dépendra aussi de l’évolution des normes internationales et de l’engagement des pays pollueurs à compenser équitablement les pays forestiers.

Conclusion : Le Gabon incarne le paradoxe d’un pays climatologiquement exemplaire, mais économiquement sous-récompensé. Transformer ses forêts en actifs financiers stratégiques nécessite une meilleure intégration dans les marchés climatiques internationaux, tout en évitant la marchandisation abusive de la nature.

Articles similaires

Commentaires

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Lire en lignespot_img

Les plus lus

Seraphinite AcceleratorOptimized by Seraphinite Accelerator
Turns on site high speed to be attractive for people and search engines.