Alors que les constructeurs occidentaux concentrent leurs efforts sur l’Europe et l’Asie, les véhicules électriques chinois marquent une percée stratégique en Afrique, profitant d’un marché encore fragmenté et peu structuré. Avec des prix compétitifs, une disponibilité immédiate et l’absence d’alternatives locales crédibles, la Chine s’impose comme l’acteur dominant dans l’électrification des mobilités sur le continent.
Une croissance rapide, mais encore marginale à l’échelle mondiale
Selon le rapport « Global EV Outlook 2025 » de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), les ventes de véhicules électriques en Afrique ont plus que doublé en 2024, atteignant 11 000 unités. Bien que cela ne représente que 0,1 % du marché mondial, cette croissance est révélatrice d’un potentiel en devenir, largement capté par les constructeurs chinois.
Le Maroc, l’Égypte, l’Afrique du Sud, l’Éthiopie et le Nigeria figurent parmi les pays les plus dynamiques, bien que les infrastructures de recharge et les services d’entretien restent limités, notamment en dehors des capitales. Les importations en provenance de Chine représentent à elles seules 75 % de la croissance du marché des véhicules électriques dans les pays émergents hors Chine.
BYD, Chery et Geely : fers de lance de l’expansion chinoise
Parmi les leaders de cette percée, BYD, géant chinois de la voiture électrique, se distingue par son partenariat stratégique avec CFAO Mobility. En 2024 et 2025, la marque a officiellement lancé ses modèles au Bénin, au Nigeria, au Rwanda, au Kenya, en Côte d’Ivoire, à Madagascar et au Zimbabwe, avec à chaque fois des services complets incluant bornes de recharge, pièces détachées et solutions de recharge à domicile.
D’autres marques comme Chery, Geely ou encore BAIC renforcent également leur présence. En Égypte, BAIC a même lancé un projet de construction d’une usine dédiée aux véhicules électriques, visant une capacité de production de 50 000 unités annuelles à horizon 2030.
Une dépendance chinoise faute d’alternatives locales
Le continent africain reste, pour l’instant, un marché de consommation passive. Les marques africaines n’ont pas encore émergé sur le segment des voitures électriques, en dehors de quelques initiatives sur les deux-roues. Les marques occidentales, quant à elles, se désintéressent largement du marché africain, focalisées sur des zones plus matures.
Dans ce vide stratégique, les constructeurs chinois — déjà puissamment ancrés dans les chaînes de valeur mondiales des batteries et composants — occupent le terrain avec agilité.
Une transition électrique à la croisée des chemins
Pour sortir de cette dépendance, l’Afrique devra impérativement bâtir des politiques publiques coordonnées, investir dans les infrastructures de recharge et encourager l’implantation d’usines locales. Faute de quoi, elle continuera d’importer ses véhicules électriques sans en maîtriser ni la technologie, ni les emplois, ni la valeur ajoutée.
À l’échelle mondiale, l’AIE prévoit qu’en 2030, 40 % des voitures neuves seront électriques. Sans stratégie ambitieuse, l’Afrique risque de rester spectatrice de cette transition.